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lundi 25 juin 2012

Portrait de réalisateur / Michael Haneke

J'ouvre une nouvelle rubrique sur ce blog, le portrait de réalisateur. Il ne s'agira pas de faire une longue énumération en hypertexte de ses intentions de réalisation façon Wiki, mais plutôt au travers quelques films de présenter un personnage que j'apprécie particulièrement, un réalisateur, un director, une manière d'envisager le cinéma.

Michael Haneke - 1942 - Munich

Michael Haneke est un grand réalisateur méconnu du sacrosaint grand-public me semble-t-il. Quel dommage ! Son génie ne tient pas aux quelques Palmes d'Or à Cannes (2009 - Le ruban blanc - et 2012 - Amour) mais plutôt à ses films toujours surprenants et froids qui portent en eux de véritables problématiques sociales et humaines qu'il fait bon de se les entendre dire. Il  met en scène notre quotidien de façon remarquable avec un souci permanent de la finesse et de l'originalité.

L'oeuvre d'Haneke est justement très hétérogène. De petits films pour la télévision à ses débuts en passant par des remakes Hollywoodiens à gros budget, Michael Haneke garde toujours et de façon quelque peu névrosée son style, son cinéma qu'il aime habiller d'intrigue profonde. Il filme les objets, leurs traces. Les traces du présent. Il filme les Hommes, leurs non-dits. Les non-dits des émotions. Haneke est un réalisateur ancré dans le réel, qui aime nous montrer ce que l'on ne voit pas, ce que l'on ne comprend pas, donc ce qui nous dépasse. En somme, tout ce qui nous semble impalpable. Rare sont les cinéastes qui s'attachent autant à la réalité quitte à choquer, rappelons-nous du scandale qu'avait fait à sa sortie Funny Games du fait, notamment, de l'intrusion illusoire du réel (regard-caméra pour ne citer que cela) dans le film, quant à lui bien fictif.

Benny's video - Michael Haneke - 1992
Benny's video - 1992
En schématisant grossièrement par une métaphore l'aspect technique du cinéma d'Haneke, on pourrait dire que ses films peuvent se rapprocher d'une succession cohérente de tableaux, bien dessinés, sans rature ni bavure : les coups de crayon de l'esquisse - les mouvements - sont propres, la mine - la caméra - est fine, les pinceaux - les acteurs - sont bien secs et les peintures - la mise en scène et le décor - sont très froides. Sobriété, en un seul mot. Le cadre de la caméra est souvent fixe, immobile, puis brutalement en mouvement (jamais bien longtemps). Haneke aime l'immobile, l'étrange, la surprise. On est derrière le miroir. On pénètre ses personnages comme l'on ouvre la boite de Pandore. On perçoit tout. La réalité est inscrite dans ses films autant que la folie dans ses personnages. La pianiste laisse notamment un sentiment très particulier sur l'amour et la séduction. Il déconstruit ce que l'on semble connaître. Qu'est-ce qu'aimer ? Haneke pose des questions, s'interroge, sans jamais donner de réponse. Il n'y a pas de solution à donner tel un scientifique en charge d'une vérité, Haneke donne à voir et pas à comprendre. 


La pianiste - 2001
Il fait du cinéma total, sans pression. La multiplicité de ses producteurs en atteste. Sans jamais se répéter, ni se contredire, il continue, intègre, à faire son cinéma. Il insuffle toujours la même energie dans ses films mais de façon biaisée, inattendue et en prenant soin de ne pas laisser le temps ni la situation géographique (hormis peut être pour Le ruban blanc) faire son oeuvre. En effet les marqueurs temporels et spatiaux n'existent pas ou prou dans ses films. Cette intemporalité est remarquable avec Funny Games et Funny Games US. Plan par plan, travelling par travelling, Haneke a choisi, par défi je suppose, de faire le remake de son propre film réalisé 10 avant, fait rare dans l'industrie du cinéma. Au delà du caractère égocentrique évident d'une telle activité, Haneke montre ici un trait essentiel de son cinéma : hors du temps, hors des courants. De l'intégrité en somme. Haneke est un réalisateur à connaître, à voir mais surtout pas à comprendre.

Funny Games - 2007
Funny Games - 1997


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